Pas facile aujourd’hui pour un citoyen désireux de faire « bouger » les choses de savoir si ses actions sont vraiment utiles, ou non. En effet, si les initiatives positives et optimistes se multiplient (relayées par d’excellents films comme Demain ou 20 ans pour sauver le monde, qui sort tout juste), force est de constater que les nouvelles sur l’état du monde ne poussent pas à l’optimisme, bien au contraire : dérèglement climatique incontrôlable, pollution catastrophique, épuisement des ressources non renouvelables, délitement du corps social, dette mondiale apocalyptique etc. Chaque jour qui passe nous apporte son lot de mauvaises nouvelles. Pire encore : ces mauvaises nouvelles du présent tendent à laisser penser que demain ne sera pas meilleur, loin de là.
D’où cette question fondamentale que vous êtes nombreux à vous poser (et à nous poser) : à quoi bon vous engager dans votre changement de vie ? Pensez-vous vraiment que les changements individuels que vous mettez en place peuvent contribuer à changer (voire sauver) le monde ?
Soyons clairs : notre projet Famille Durable n’a pas pour ambition de sauver le monde. Le prétendre serait à la fois un pieu mensonge, mais aussi extrêmement prétentieux. Nos objectifs sont bien plus modestes : nous souhaitons avant tout avoir une vie en cohérence avec nos aspirations profondes et avec nos convictions humanistes et environnementales.
Mais pas seulement.
Comme évoqué dans notre article sur mon expérience politique, nous sommes convaincus que la clé de la transformation du monde passera par la multiplication des initiatives locales et individuelles. En ce sens, nous pensons fondamentalement qu’il n’y a pas d’initiatives inutiles : tous les progrès que vous pourrez réaliser seront un moteur inépuisable pour vous, mais aussi une source d’inspiration pour d’autres. Même s’il faut parfois attendre un peu pour le voir !
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De la légende du Colibri à la théorie de la Percolation
Bon, on ne la présente plus, cette légende du Colibri, chère à Pierre Rabhi. Vous savez, l’histoire de ce petit oiseau qui se démène à acheminer dans son bec goutte d’eau par goutte d’eau, pour éteindre un incendie dans la forêt, et qui répond sans ciller à ses congénères incrédules, lui demandant pourquoi il faisait ça en sachant que cela n’éteindrait pas le feu : « je fais ma part ».
S’engager dans une cause, c’est donc déjà avoir cette posture du Colibri : avoir conscience que notre action n’éteindra pas l’incendie, mais savoir que l’on contribue au changement à hauteur de ses possibilités.
Alors c’est vrai, la posture de la résignation est plus confortable.
« Pourquoi m’embêter à trier mes déchets, il y a déjà un continent de plastique au milieu du Pacifique ! »
« A quoi bon éviter de prendre ma voiture : il y a 1 milliard d’indiens et de chinois qui sont en train de s’équiper, alors mon impact à moi sur les émissions de CO2… »
« A quoi ça sert que je boycotte telle marque / telle émission de télé ? De toute façon, il y a des millions de gens qui continueront à l’acheter / la regarder »
Combien de fois ai-je entendu ces rengaines ? Combien de fois ai-je ressenti de la colère ou de la tristesse face à ces remarques auxquelles je ne savais pas forcément quoi répondre.
Aujourd’hui, cette légende du Colibri nous aide, dans notre projet Famille Durable, à garder confiance et motivation dans notre projet, car cette conviction que nous faisons notre part est une force considérable et un argument important dans nos discussions avec les personnes dubitatives sur notre aventure.
Mais une autre théorie vient considérablement appuyer la légende du Colibri : il s’agit de la théorie de la percolation. Quand on s’appuie sur l’histoire du Colibri, on reste dans une démarche « solitaire » : le petit oiseau fait sa part, et son engagement pourra être source d’inspiration pour les autres (nous en parlerons plus loin). Avec la théorie de la percolation, l’idée est que la multiplication des initiatives individuelles peut, à terme, entrainer un changement radical et brutal du système.
Une belle explication est disponible sur ce site de prospective. Sans rentrer dans les détails scientifiques de cette théorie, l’idée de fond de la théorie de la percolation est qu’au sein d’un système, des transformations marginales et isolées des acteurs de ce système peuvent, après un certain temps, atteindre un certain seuil qui va alors transformer le système dans son ensemble.
« Oui, et donc, où veux-tu en venir ? » me direz-vous ?
Eh bien, chers amis, selon moi (qui suis pourtant plutôt pessimiste de nature), cette théorie permet d’envisager que la multiplication des initiatives des « petits colibris » de par le monde permettra un jour de faire basculer le monde dans son ensemble ! Et donc qu’il n’y a pas de « petite initiative inutile ». C’est la même chose avec l’idée des « signaux faibles » : les grandes transformations sociales et économiques ont toujours commencé par des « petites actions » qui ont percolé jusqu’à être acceptées et poussées par toute la société.
Regardons autour de nous : il y a 10 ou 15 ans, parlait-on autant de permaculture ? de « maker » ? d’écologie ? de « mieux manger » ? de parentalité positive et bienveillante ?
Non, ou alors de manière très très marginale. Aujourd’hui, c’est de moins en moins le cas. Des millions de colibris apportent leur goutte d’eau pour éteindre l’incendie. Gageons que d’ici quelques années, tous les animaux de la forêt se joindrons à nous !
Changer pour soi-même n’est pas forcément égoïste
Alors c’est vrai, la théorie de la percolation n’est qu’une théorie (physique) : nous ne pouvons avoir aucune certitude qu’elle s’appliquera aux changements de système et de société auxquels nous aspirons. C’est un espoir que nous pouvons avoir, et une source de motivation forte notamment dans les moments difficiles. Mais cela ne veut pas dire que le combat sera forcément gagné.
Vouloir changer de vie, changer de boulot, changer le monde est-il alors inutile dans ce cas ? Pas du tout, car tous les changements que vous pourrez mettre en œuvre dans votre vie seront toujours un grand pas en avant vers plus de bonheur personnel et un meilleur équilibre intérieur pour vous et votre famille. Et une telle évolution positive a le pouvoir de transformer profondément votre vie et celle de vos proches dans le bon sens. Or, nous sommes convaincus, dans notre projet Famille Durable, qu’on ne peut pas vouloir changer le monde sans se changer soi même !
« D’accord, mais c’est pas un peu égoïste ton truc ? En gros, tu nous dis qu’à défaut de changer le monde, autant se concentrer sur soi même, ce sera déjà bien »
Oui, c’est vrai… Et pourtant, je suis convaincu que toute transformation personnelle aura pour effet de nous ouvrir aux autres, à l’opposé de la vision égoïste et étriquée qu’on peut avoir des techniques traditionnelles de développement personnel.
Je suis en train de lire le dernier livre de Sébastien Henry, « Agir pour Soi et pour les Autres, Ensemble » (préfacé par Matthieu Ricard qui a déjà aussi beaucoup également abordé ce sujet) : en substance, Sébastien Henry raconte son cheminement personnel, du monde des affaires effrénées à une vie laissant plus de place au spirituel et à la méditation… et montre que cette évolution personnelle l’a amené peu à peu à plus d’ouverture aux autres, à plus d’altruisme et à toujours plus d’engagements humanistes.
Je trouve cet exemple très inspirant. En effet, combien sommes-nous aujourd’hui, noyés dans notre « métro / boulot / dodo », fatigués par nos trajets maison / travail, vides de toute énergie pour s’impliquer dans des associations ou des initiatives collectives locales ? Prenons même l’exemple de l’organisation de la fête de l’école maternelle de notre fille : ce sont toujours les 6-7 mêmes couples de parents que nous retrouvons à chaque réunion depuis 2 ans (sur 120 parents aptes à s’impliquer pour organiser une belle fête pour leurs enfants) !
C’est donc aussi une raison forte de notre souhait de changement de vie au sein de la Famille Durable : en transformant nos quotidiens, en trouvant + de sens à nos activités, en améliorant notre alimentation et notre mode de vie, nous savons que nous en tirerons une énergie nouvelle pour nous ouvrir davantage aux autres et nous engager plus fortement dans des actions collectives inspirantes et inspirées !
L’inspiration n’est pas toujours où on le pense !
L’inspiration est aussi un point clé de notre réflexion sur le changement de vie. Prenez l’exemple de l’élection présidentielle : combien de gens décident de voter pour tel candidat plutôt que tel autre « parce qu’il a du charisme, parce qu’il est inspirant ». Que cela soit une bonne raison ou non, le débat n’est pas là : le point clé est que les personnes inspirantes / les initiatives inspirantes peuvent être une source de motivation et une incitation forte à l’action pour les individus.
Sauf que nous faisons tous une erreur majeure : nous avons tendance à ne considérer comme inspirant que les « grands » de ce monde, ou des héros « inaccessibles » pour le commun des mortels. Ce qui peut avoir pour effet de croire que nous ne pouvons pas être, nous même, acteur du changement du monde. C’est sûr que si nous croyons qu’il faut forcément être mère Térésa, l’abbé Pierre ou Nelson Mandela pour changer le monde, nous resterons au chaud dans notre canapé plutôt que de nous lancer.
Alors qu’il faut tout simplement changer de lunettes et regarder les « petits héros » de notre quotidien : je pense à cette voisine qui, 2 fois par semaine, va voir un de nos voisin, veuf et âgé, pour voir si tout va bien et discuter un peu avec lui. Je pense à cette maman qui s’est engagée en tant que parent d’élève dans l’école de ses enfants et fait en sorte que la voix des parents soit écoutée par l’administration. Je pense à ce papa qui s’occupe de la gestion administrative de l’association sportive de son fils, ainsi que de l’accueil de la permanence le dimanche matin. Je pense à ces grands parents qui font du soutien scolaire gratuitement 3 soirs par semaine, ou à tous ces hommes et ces femmes qui accompagnent les enfants malades dans les hôpitaux ou les personnes en fin de vie dans les services de soins palliatifs.
Bref : nombreux sont ceux qui donnent un peu de leur temps dans un engagement qui leur tient à cœur. Nous connaissons tous une personne au moins dans ce cas dans notre entourage proche, n’est-ce pas ? Eh bien décidez maintenant, en conscience, que cette personne soit votre personne source d’inspiration au quotidien. Cela ne veut pas dire d’oublier Mandela ou Mère Térésa : c’est toujours positif d’avoir de grands idéaux ! Mais en vous accrochant à quelqu’un comme vous, proche de vous, l’engagement concret sera plus facile, plus accessible. Et le premier pas pour vous lancer (qui est toujours le plus difficile à faire, mais qui est aussi le plus important car une fois lancé, on est difficilement arrêtable) sera beaucoup plus naturel et spontané.
J’aime l’expression qui dit qu’un con qui marche va toujours plus loin qu’un mec intelligent qui reste assis. J’ai longtemps eu la posture auto-satisfaite du mec qui se considérait comme intelligent car en pensant l’action, il considérait qu’elle était quasi terminée. Avec notre projet Famille Durable, ma perspective a complètement changé et j’adopte avec bonheur cette posture du con qui avance, grâce notamment à l’inspiration de tout un tas de proches, réellement engagés au quotidien pour changer les choses à leur échelle.
Il ne tient qu’à vous de changer les choses
Alors, le monde peut-il être sauvé, ce monde peut-il être changé ? Je mentirais si je vous donnais une réponse « ultime », un grand oui ou un grand non, qui aurait le mérite de se draper de certitude mais serait une illusion (mais on sait que le cœur de l’Homme préfère un doux mensonge qu’une vérité qui dérange !). Cependant, je peux affirmer ceci : le seul moyen de faire changer le monde, c’est de se changer soi-même. Et que se changer soi-même passe notamment par 3 clés :
- Ne jamais céder au désespoir de croire que nos petits changements, même les plus minimes, ne servent à rien
- Ne jamais croire que les changements que l’on fait pour soi-même sont des actes égoïstes surtout quand on vise à être une meilleure personne
- Chercher dans nos vies de tous les jours des « héros du quotidien », source intarissable d’inspiration sur notre chemin
Et soyez certains que si ces changements ne sauvent finalement pas le monde, ils auront quand même contribué à le rendre meilleur. Et à vous rendre meilleur. Ce qui est déjà, en soi, un cadeau merveilleux.
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Cecile B.
Bel article, le dernier livre de Cyril Dion semble aller dans ce sens, il ne renie pas les initiatives individuelles mais dit qu’elles ne suffisent plus et qu’il faut transformer de manière collective… Un livre très utile !
David
Je trouve que la société a quand même beaucoup changé.
Les thèmes écologiques, alternatifs, autrefois jugé comme délirant ou arriéré sont maintenant davantage pris au sérieux.
Par exemple le revenu de base a fait son introduction dans la campagne présidentielle!
Après, concernant le changement, de plus en plus je suis persuadé du vieux dicton : charité bien ordonné commence par soi-même.
D’abord faire en sorte d’aller bien avant d’aider les autres.