J’entends beaucoup de gens se plaindre.
De l’état du monde.
De l’état de la France.
De nos hommes politiques pourris.
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Des élections qui ne servent à rien.
De nos députés fainéants.
Etc. Etc.
Moi le premier, il m’est arrivé de porter de telles récriminations. Mais au fond de moi, je trouvais ça malhonnête intellectuellement. Ma conscience me disait “OK, tu peux toujours considérer, certainement à raison, que nos politiciens ne sont ni bons, ni honnêtes, ni tournés vers l’intérêt général. Mais toi, que proposes tu ? Que fais tu pour que les choses s’améliorent ?”. Et là, je dois vous avouer que ma conscience avait marqué un point… Il est facile de critiquer, plus difficile d’agir vraiment pour construire quelque chose (c’est d’ailleurs la grande force des extrêmes…)
J’ai donc décidé il y a quelques années de me lancer en politique. A une condition : celle de ne pas militer dans un “parti de gouvernement”, ces mouvements de notables qui avaient, à mes yeux, mené notre société au bord du précipice auquel nous nous trouvons aujourd’hui. J’ai donc rejoint ce qu’on appelle communément un “petit parti” où j’ai rencontré beaucoup de gens “comme moi”, à savoir des citoyens avec un boulot, une famille à côté de leur engagement, et qui avaient décidé de consacrer du temps à un mouvement alternatif pour essayer de faire changer les choses.
Les premiers mois ont été intéressants. Entre débats d’idées et actions de terrain, j’avais le sentiment que nous pouvions faire bouger les choses, si tant est que nous puissions être entendus par nos concitoyens.
Puis vinrent les premières élections. Candidat aux départementales, j’ai subi de plein fouet ce que je perçois comme une injustice monstre : l’asymétrie de moyens entre les partis / candidats. Si vous ne le savez pas, eh bien sachez que seuls les candidats qui réalisent plus de 5% à la plupart des élections se voient rembourser TOUS leurs frais de campagne (dans la limite d’un plafond défini par l’Etat). Ceux qui font moins de 5%, eux, n’ont droit à aucune aide. Cette asymétrie a un effet pervers énorme : quand vous êtes d’un petit parti et que vous estimez peu probable de faire plus de 5%, vous mettez peu d’argent dans votre campagne, car, à moins d’être millionnaire, vous ne voulez pas que votre engagement politique plombe votre budget personnel. A l’inverse, ceux des grands partis, qui sont certains de faire plus de 5%, peuvent immédiatement engager des sommes importantes (quitte à faire un prêt) car ils savent qu’ils seront de toute façon intégralement remboursés. Or, un budget de campagne, ce sont des affiches, des tracts, des vidéos, bref, tout un tas d’éléments qui permettent de communiquer son programme, de toucher tous les électeurs, bref, de se faire connaitre.
Et s’il est vrai qu’avoir beaucoup de moyens ne garantit pas d’être élu, ne pas en avoir garantit de ne pas l’être.
J’ai vécu cela comme une injustice profonde. Non parce que faire un petit score était dur pour mon ego (au contraire, j’ai trouvé ça très formateur). Mais parce que j’ai réalisé à quel point notre démocratie était totalement dysfonctionnelle : les élections sont totalement biaisées et les “petits” n’ont en fait quasiment aucune chance d’émerger compte tenu de cette asymétrie de moyens.
J’ai ensuite été sur la liste aux régionales, et me suis ensuite de moins en moins investi, jusqu’à la présidentielle qui m’a ensuite totalement dégoûté de la politique.
Dégoûté d’avoir pu voir à quel point on a pu mépriser les “petits”.
Dégoûté d’avoir vu l’Etat autoriser les différences de temps de parole basées sur des sondages aux méthodologies contestables.
Dégoûté d’avoir vu les médias officiels prendre à ce point fait et cause pour un candidat, au mépris de toutes les règles de déontologie journalistique.
Bref, cette élection a été pour moi la mascarade de trop qui m’a poussé à une réflexion critique sur le monde politique.
Et si je dois tirer un bilan de cette expérience, je mettrais en avant les 3 conclusions suivantes :
- Oui, beaucoup d’hommes politiques n’ont aucun sens de l’intérêt général. Ils servent des intérêts particuliers, en premier lieu les leurs, et ne pensent qu’à durer et à faire durer leurs copains et leurs clientèles. Il est indispensable pour cela que nous, citoyens, réagissions, en faisant tout pour que de nouvelles têtes émergent, mais aussi que le système change pour que le renouvellement se fasse de fait, par des règles de non cumul ou de nombre de mandats maximum
- Oui, nous, citoyens, sommes responsables de cette situation. Nous ne pouvons pas nous défausser de nos responsabilités. Parce que nous continuons trop souvent à voter pour les mêmes partis qui ont échoué (et que pourtant nous critiquons !) mais qui nous assurent un certain confort par leur immobilisme. Parce que nous ne nous intéressons pas aux offres alternatives, celle des “petits partis”, car nous voulons “gagner” l’élection (alors qu’une élection ne devrait pas être une compétition, où il y a gagnants et perdants… mais un affrontement d’idées, et un jalon pour le futur !). Parce que nous critiquons les politiciens mais ne voulons pas nous engager d’une quelconque manière (pas le temps, pas l’argent, pas envie, parce que j’ai piscine les jours de réunion etc.). Une démocratie fonctionne si ses citoyens se l’approprient et la font vivre, pas seulement en mettant un bulletin dans une urne tous les 2 ou 3 ans. Et ce n’est clairement plus le cas aujourd’hui
- Oui, notre système démocratique est malade et, pour dire clairement les choses, nous vivons dans une parodie de démocratie réelle. Nous élisons des représentants pour appliquer un programme qu’ils n’appliquent finalement pas, mais qui prennent également des décisions sur des sujets qui n’étaient pas dans leur programme et donc pour lesquels ils n’ont pas reçu “mandat” pour décider pour nous. Il faudrait un vrai “big bang” institutionnel, qui remettrait à l’ordre du jour les référendums et pousserait beaucoup plus loin l’implication des citoyens que nous sommes
Pour terminer ce bref retour d’expérience, je dirais que je ne crois plus que la politique et les politiciens peuvent faire changer les choses (sauf peut être encore au niveau local), tout du moins rapidement et à court terme. Je pense que d’autres modes d’action, d’engagement sont beaucoup plus efficaces et porteurs de sens, que ce soit dans des associations, des ONG ou tout groupe de personnes motivées qui a envie de faire bouger le cocotier. C’est aussi un de mes objectifs “famille durable”.
Et vous, partagez vous ma vision du système ?
Crédit photo: https://www.flickr.com/photos/charlottehenard/
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david
Bonjour,
Je diverge sur votre vision des moyens par une approche plus rationnelle.
Si l’état remboursait toutes les campagnes de tout les partis, il y aurait des milliers de partis à chaque élection.
La limite de 5% est aussi une limite de limitation des partis candidats!
C’est triste dans un sens, mais nécessaire dans un autre.
Pour la politique, j’avoue devenir un supporteur du tirage au sort allié au mandat unique.
Sinon, pour un vote bien plus efficace, il suffit de voter tout les jours :
http://www.jevoteauquotidien.fr/
😉
Arnaud
Bonjour,
Merci pour tes messages ! Concernant la limite des 5%, je pense qu’il y a tout un tas de moyens permettant d’éviter une dérive avec des milliers de partis qui se créeraient pour toucher la “manne publique” si on supprimait cette limite : créer un régime d’agrément des partis, mettre en place différents plafonds de remboursements à partir de 1% des voix etc. A mes yeux, le système actuel pousse au bipartisme / tripartisme (et l’exception “En Marche” est l’arbre qui cache la forêt), alors que les citoyens n’ont jamais eu autant envie d’alternatives.
Concernant ce que tu dis sur le tirage au sort + mandat unique, j’en suis de plus en plus un partisan également (cf. les travaux d’Olivier Chouard, passionnants sur ce sujet)
Amicalement
Arnaud